Le Kirchentag
Le Kirchentag est un rendez-vous, régulièrement adressé depuis 1949, aux protestants allemands et européens par des laïcs membres de l’EKD (Evangelische Kirche in Deutschland). Son propos est de réfléchir aux problèmes du présent dans leurs défis et dans leurs espérances. Il se réunit tous les deux ans au moment de l’Ascension.
Pourquoi un Kirchentag ?
La conférence de Yalta en 1945 avait décidé de la division de l’Allemagne en quatre zones d’occupation. La partition de l’Allemagne entre la République Fédérale d’Allemagne (RFA) et la République Démocratique Allemande (RDA), devient effective en 1949. Par ailleurs dès 1948, les Églises protestantes allemandes luthériennes et réformées, qui étaient jusqu’à ce moment de statut régional, décident de se rassembler dans une structure unique, l’Église évangélique allemande (EKD), dont dépendent les services sociaux d’entraide et les Académies évangéliques. Ces transformations sont la conséquence du passé récent. Mais dans cette situation nouvelle, encore incertaine et souvent inquiétante, il importe de créer des occasions concrètes et visibles de dialogue et de réflexion. L’organisation d’un Kirchentag (Deutscher evangelischer Kirchentag, DEKT) aux fins de prendre le temps de faire le point a été l’une d’entre elles, originale et exigeante.
Le fondateur du Kirchentag, Reinold von Thadden-Trieglaff (1891-1976)
Reinold von Thadden-Trieglaff appartient à une famille de hobereaux poméraniens. Juriste et officier de réserve de la Wehrmacht, il est dans l’entre-deux-guerres le secrétaire général de la Deutschen Christliche Studentin Vereiningung, la branche allemande de la Fédération Universelle des Associations Chrétiennes d’Étudiants (FUACE). Parmi les activités qu’il a engagées, il a repris une vieille tradition de l’Église évangélique unie de Prusse au XIXe siècle, celle d’organiser de temps à autre un temps de « retraite » : une « semaine évangélique » (Evangelische Woche) ou une journée (Kirchentag).
Reinold von Thadden-Trieglaff est l’un des premiers signataires de la Confession de Barmen en 1934, aux côtés de Karl Barth, Martin Niemöller, Hans Lilje, Dietrich Bonhoeffer et beaucoup d’autres qui refusent la soumission de l’Église protestante au pouvoir nazi.
Pendant la Seconde guerre mondiale, il perd trois de ses fils, engagés sur le front russe. Sa sœur, Elisabeth von Thadden-Trieglaff est décapitée en 1944 parce qu’elle appartient à un réseau de résistance au nazisme qui agit en France dans la région de Meaux. Lui-même, obligé comme officier de réserve à un service dans la Wehrmacht, est gouverneur de la ville de Louvain. Il y protège les citoyens menacés par le nazisme, ce qui lui vaut d’être nommé citoyen d’honneur de cette ville en 1947. En 1945, à son retour en Prusse, il est fait prisonnier de l’Armée rouge pendant quelques mois (ses faits de résistance au nazisme sont assez vite reconnus). C’est à ce moment qu’il a l’idée d’organiser un Kirchentag, sur un modèle proche des rassemblements dont il avait pris la responsabilité lorsqu’il dirigeait la DCSV avant la guerre.
Les premiers Kirchentagen (1949-1989)
La première réunion a lieu en 1949 à Hanovre (Basse Saxe) pendant la semaine de l’Ascension. Reinold von Thadden l’organise avec l’aide de son ami Hans Lilje, à ce moment évêque luthérien du Land. Elle rassemble quelque 30 000 personnes ressortissant des deux Allemagnes. La qualité de la rencontre, les questions laissées en suspens, impliquent très naturellement une suite. La décision est prise de la renouveler régulièrement et au moins tous les deux ans, dans des lieux symboliquement importants.
Le Kirchentag suivant a lieu en 1950 à Essen, une ville de la Ruhr qui, à ce moment précis, porte des traces profondes de la guerre (chômage, quartiers en ruine). Puis c’est Berlin en 1952 et Leipzig (Allemagne de l’Est) en 1954.
Après la décision en 1961 de construire le mur, il n’est plus possible d’organiser le Kirchentag en Allemagne de l’Est. Mais beaucoup de réunions ont lieu à Berlin-Ouest, les autres villes étant Stuttgart, Hambourg, Munich. Pour chacune d’entre elles, un thème est proposé en rapport avec le temps présent et le lieu. Des ateliers de travail, théologiques, philosophiques et culturels, sont organisés. Des services religieux ponctuent ce temps de réflexion. Et il y a aussi des expositions d’artistes contemporains, des spectacles. L’ensemble est préparé avec soin par un comité d’organisation spécialement dévolu à cette tâche.
Jusqu’en 1989, le Kirchentag est un moment privilégié de dialogue avec les Allemands de l’Est qui ont pu venir. Les contacts qui s’y sont développés ont eu leur part dans la mobilisation des Églises protestantes de l’Est pour la chute du mur en 1989 et la réunification de l’Allemagne en 1990. Le fils de Reinold von Thadden-Trieglaff, l’historien Rudolf von Thadden (1932-2015) s’y est très particulièrement engagé.
Après la chute du mur de Berlin
Après la chute du Mur, le Kirchentag s’engage dans la réconciliation de l’Europe. Les rassemblements comptent souvent plus de 150 000 personnes. Des responsables politiques et universitaires, venus souvent de toute l’Europe, sont chargés des conférences plénières. Les participants sont invités à proposer des stands d’information qui mettent en valeur leurs activités.
En 2003 à Berlin, le Kirchentag est œcuménique. En effet, après le concile Vatican II, l’Église catholique d’Allemagne se préoccupe, elle aussi, d’organiser régulièrement des temps de rassemblement, les Katholikentagen. Des contacts établis entre les responsables permettent cette première réunion commune. Plus de 190 000 personnes (dont 40 000 catholiques) y prennent part. A partir du thème général « Vous devez être une bénédiction », quatre chantiers de réflexions sont ouverts (témoigner de la foi et vivre dans le dialogue ; chercher l’unité et rencontrer l’autre dans la diversité ; respecter l’humanité dans son devenir et défendre la liberté ; façonner le monde et agir en responsabilité). Expositions, spectacles, divers stands de participants sont autant de lieux de rencontre. D’autres Kirchentagen œcuméniques ont lieu ultérieurement.
En 2017, à Berlin et à Wittemberg, la place est réservée au 500e anniversaire de l’affichage des Thèses de Luther contre les indulgences.
L’organisation du Kirchentag
C’est un conseil de laïcs, le Præsidium, qui définit le thème du Kirchentag à venir. Il est présidé d’abord par Reinold von Thadden-Trieglaff (1949-1964). Richard von Weizsäcker (futur président de la République) lui a succédé (1964-1970 et 1979-1981). Elisabeth Raiser (fille du précédent) dirige la préparation du Kirchentag œcuménique (2001-2003). C’est Christine Aus qui prépare celui de 2017.
L’organisation des journées demande beaucoup d’attention, étant donné le nombre des participants, dès le début supérieur à 30 000 et dépassant souvent les 200 000 depuis la chute du Mur. Elle est confiée à un secrétariat général dirigé par un pasteur de l’EKD. Le siège se trouve à Fulda (Hesse). Le secrétariat organise l’hébergement, les ateliers, les conférences plénières. Il trouve les sources de financement notamment auprès des Académies évangéliques du land hôte mais aussi auprès de fondations laïques publiques et privées.
Bibliographie
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Dazugehörige Vermerke
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