Les dernières guerres
de religion en France (1621-1629)
Sous Louis XIII, à la suite de l’affaire du Béarn, les protestants se révoltent contre le roi. Après leur défaite, ils perdent leurs assemblées politiques et leurs places de sûreté : ils ne dépendent plus alors que du bon vouloir du roi.
L'assemblée de Saumur
Après l’assassinat d’Henri IV en 1610, l’édit de Nantes apparaît fragile. Le début de la régence de Marie de Médicis inquiète les réformés en raison du rapprochement avec l’Espagne catholique. Les représentants du parti protestant tiennent une assemblée politique à Saumur en 1611. Les « prudents » avec Duplessis-Mornay, prônent le loyalisme à la couronne. Les « fermes » avec Henri de Rohan, sont prêts à l’affrontement. La stratégie de l’affrontement l’emporte en 1617 avec l’affaire du Béarn, mais la division entre prudents et fermes affaiblit le parti protestant.
L'affaire du Béarn (1617-1620)
Le Béarn était un vicomté de la famille d’Albret dont Henri IV avait hérité de sa mère, Jeanne d’Albret, en même temps que du royaume de Navarre. Par la volonté de Jeanne d’Albret, le Béarn était devenu protestant et les biens du clergé catholique avaient été mis sous séquestre. En 1599, Henri IV avait fait rétablir en Béarn l’exercice du culte catholique, mais la restitution des biens ecclésiastiques n’avait pas été effectuée. En 1616, le conseil du Béarn, composé de magistrats protestants, s’était compromis lors de troubles de nobles protestants. En 1617, le conseil du roi proclame la réunion au royaume de France du Béarn, propriété personnelle du roi, et décide d’y faire exécuter toutes les dispositions de l’édit de Nantes. Le conseil du Béarn, refuse d’enregistrer cette décision. En 1620, le roi Louis XIII arrive à Pau avec des troupes et il remplace le conseil du Béarn par un parlement où ne siègent que des catholiques. Il rétablit le culte catholique. Ce changement alarme le parti protestant dans tout le royaume et entraîne un mouvement de résistance au roi au nom de « la cause » réformée.
Les guerres de religion sous Louis XIII
Ces guerres, dites aussi guerres de Monsieur de Rohan, du nom du principal chef du parti protestant, ont pour enjeu le pouvoir politique des protestants qui repose sur les assemblées politiques et les places fortes. La monarchie tendant vers l’absolutisme ne peut tolérer longtemps une minorité à structure partisane qui apparaît comme « un état dans l’État ». Henri de Rohan frappe sa propre monnaie, les « rouanes », à Anduze : ce sont des douzains semblables à ceux du roi. Dans une lettre de novembre 1628, Henri de Bourbon accuse Henri de Rohan de « faire battre monnaie aux armes royales et dues au roi seul ».
Première guerre (1621-1622)
Une assemblée nationale des Églises réformées s’était réunie à la Rochelle. Elle comprenait 75 députés, pasteurs et laïcs, pour la plupart liés aux principales familles nobles protestantes. Beaucoup d’Églises avaient refusé d’envoyer des députés. L’assemblée de la Rochelle proteste contre l’annexion du Béarn et organise des levées de taxes et de soldats et fait même appel à la protection du roi d’Angleterre. Refusant de se dissoudre, l’assemblée apparaît comme faisant sécession, bien qu’elle déclare demeurer fidèle au roi et ne chercher qu’à défendre la liberté des Églises réformées. Les principaux chefs protestants sont :
- Henri de Rohan qui commande en Languedoc
- Benjamin de Rohan, son frère seigneur de Soubise, qui reste dans la région de la Rochelle.
Louis XIII se met en campagne en avril 1621 et entre sans résistance dans les deux villes protestantes de Saumur et de Thouars. La ville de Saint-Jean d’Angely en Saintonge, tenue par Soubise, résiste mais doit se rendre après un siège de deux semaines. Ses remparts sont renversés et elle perd ses privilèges. L’armée royale se dirige ensuite vers Montauban pourvue d’une forte garnison et met le siège devant la ville. Mais atteinte d’une épidémie de fièvre qui lui cause beaucoup de pertes, elle se retire. Henri de Rohan est maître du Languedoc. Il établit son quartier général de 1622 à 1629 à Anduze dont il fait une place forte (aujourd’hui subsiste un vestige des fortifications de la ville : la tour de l’horloge). Soubise tient la Rochelle qui avait acquis la suprématie maritime sur la côte atlantique. Il pille les villes catholiques du Bas-Poitou. Le roi, appelé au secours, livre bataille dans le marais poitevin de Rié. Soubise perd plusieurs milliers d’hommes mais s’échappe de justesse. Poursuivant son avantage l’armée royale occupe les places protestantes de Guyenne et pousse jusqu’à Montpellier dont elle fait le siège sans succès. En octobre 1622, sous les murs de Montpellier, le roi accorde un traité aux protestants. Une amnistie couvre tous les faits de guerre de 1621 à 1622. Les protestants doivent démanteler de nombreux sites fortifiés et renoncer à tenir garnison dans certaines de leurs places de sûreté. Le roi entre dans Montpellier. L’assemblée de la Rochelle accepte les termes du traité et se disperse.
Deuxième guerre (1624-1625)
La paix de Montpellier en 1622 n’était de fait qu’une trêve. Au début de 1624 les hostilités reprennent lors d’un coup de main de la flotte de la Rochelle dans la rade du fleuve Blavet, près de Lorient. Soubise confisque tous les vaisseaux présents dans la rade. Au début 1625, il prend le contrôle de tous les ports des îles de Ré et d’Oléron au large du littoral charentais. En 1625, le conseil du roi, dans lequel Richelieu était entré comme ministre dès 1624, lance trois expéditions :
- aux environs de Castres,
- dans l’île de Ré où les soldats du roi débarquent,
- en mer où les Rochelais sont défaits en septembre 1625 au large de l’île de Ré, ce qui conduit Soubise à se réfugier en Angleterre.
Un accord de réconciliation est conclu en 1626 grâce à l’entremise des Anglais. Louis XIII maintient aux protestants les « privilèges » de l’édit de Nantes mais impose à la Rochelle la présence d’un commissaire pour y contrôler le conseil de la ville.
Troisième guerre (1627-1629)
En 1627, l’Angleterre se déclare protectrice des réformés français. À partir de mars 1627, le duc de Buckingham prépare une expédition navale anglaise contre la France avec plus de 80 vaisseaux et 10 000 hommes. Il est accompagné de Soubise. Les habitants de la Rochelle sont divisés. Les magistrats, notamment le maire, Jean Guiton, veulent rester fidèles au roi, mais la ville s’ouvre aux Anglais. Le duc débarque dans l’île de Ré dont la citadelle de Saint-Martin résiste. Une contre-offensive royale oblige l’escadre anglaise à se retirer en octobre 1627. À partir d’août 1627, Richelieu organise le siège de la Rochelle. Le blocus est réalisé grâce à une tranchée fortifiée de 12 km complétée par une digue de 1 800 m constituée de bateaux coulés en mer. En mars 1628, la Rochelle repousse un assaut des troupes royales. En mai, le duc de Buckingham revient mais renonce à forcer le blocus et se retire. Une autre flotte anglaise revient fin septembre puis se retire sans résultat. De son côté, Henri de Rohan, bloqué dans les Cévennes, ne peut envoyer de secours. En octobre 1628 la Rochelle, épuisée par la famine, se rend après plus d’un an de défense héroïque organisée par son maire. Lors de la reddition, la ville est jonchée de morts que les survivants n’ont pas eu la force d’enterrer. Il ne reste que 150 soldats capables de se tenir debout et 5 000 habitants vivants. Pour Richelieu, qui a dirigé les opérations de siège, c’est un succès politique personnel. En Languedoc, Henri de Rohan tenait toujours. En septembre 1628, il avait entamé des négociations avec l’Espagne devenue adversaire de la France. Lorsque celles-ci aboutissent, les secours espagnols n’ont pas le temps de venir avant que les forces royales, de retour d’Italie, passent à l’offensive dans le Vivarais, et prennent la place forte de Privas (Ardèche). Les habitants sont massacrés ou chassés avec interdiction de revenir et la ville est brûlée. Cette nouvelle conduit les places fortes du Languedoc à capituler. Louis XIII met le siège devant Alès (Gard) qui se rend en juin 1629. Henri de Rohan se soumet. Il est autorisé à partir en exil à Venise.
La paix d'Alès (1629)
Par la paix d’Alès (ou Alais) Louis XIII accorde son pardon aux habitants de la ville qui conservent leurs biens. Les réformés peuvent continuer à pratiquer leur religion. La paix d’Alès est confirmée par l’édit de grâce de Nîmes qui accorde l’amnistie aux protestants et confirme l’édit de Nantes mais leur enlève leurs privilèges politiques : places de sûreté et assemblées politiques. Elle met fin à six ans de guerre civile et marque la fin du parti protestant. Richelieu fait raser les fortifications des villes soulevées : les protestants sont dorénavant entièrement dépendants du « bon plaisir » du roi.
Avancement dans le parcours
Bibliographie
- Documents
- Édit de Nîmes du 20 juillet 1629 | Fichier
- Livres
- BERCÉ Yves-Marie, La naissance dramatique de l’absolutisme (1598-1660), Le Seuil, Paris, 1992
- CARBONNIER-BURKARD Marianne et CABANEL Patrick, Une histoire des protestants en France, Desclée de Brouwer, Paris, 1998
- CRETE Liliane, La Rochelle au temps du grand siège, Librairie académique Perrin, 2001
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