Soutenez Le Musée ! Faire un don

L’hébraïsme à Strasbourg

Géographiquement, Strasbourg se trouve dans l’une des régions qui voient la naissance de l’hébraïsme chrétien à la fin du XVᵉ siècle. Johannes Reuchlin est originaire de Pforzheim (à la lisière nord de la Forêt Noire), et ses travaux fondateurs au sujet de la langue hébraïque sont édités à Pforzheim, à Tübingen et à Haguenau. Un autre initiateur du mouvement des hébraïsants, Conrad Pellican, est originaire de Rouffach (entre Colmar et Mulhouse) ; il est l’auteur de la première grammaire de la langue hébraïque publiée en latin pour un lectorat chrétien, en 1504 à Strasbourg. Un peu plus loin, Heidelberg et Bâle sont de grands centres de l’humanisme en général et de l’hébraïsme en particulier.

À partir des années 1520 et l’arrivée de la Réforme à Strasbourg, la cité devient un pôle d’étude de la langue hébraïque. En effet, deux acteurs majeurs du passage de la ville au protestantisme sont hébraïsants, confirmés et convaincus : Martin Bucer de Sélestat et Wolfgang Capiton de Haguenau. Dès le début de leur activité à Strasbourg, ils donnent des cours d’exégèse de l’Ancien Testament ainsi que d’hébreu, d’abord, dans des maisons privées, puis dans des lieux d’Église.

La Haute École

En 1538, une institution de formation protestante est fondée à Strasbourg : la Haute École (Gymnasium). Dès sa création, elle compte un poste d’enseignant d’hébreu qui, plusieurs fois par semaine, dispense des cours de langue : un enseignement de la grammaire pour les débutants, puis une interprétation de certains livres de l’Ancien Testament focalisée sur des questions de langue (« selon la méthode grammaticale », pour reprendre les mots de l’un des programmes de cours).

La tradition établie à la Haute École au XVIᵉ siècle devient pérenne : l’hébreu sera enseigné dans les institutions académiques de théologie protestante à Strasbourg sans interruption jusqu’à nos jours.

« Enseignants-chercheurs » avant la lettre, les hébraïsants chrétiens strasbourgeois du XVIᵉ siècle sont les auteurs d’une littérature abondante consacrée à la langue hébraïque, à l’Ancien Testament et à des sujets connexes – une littérature que cette exposition propose de découvrir.

Cette production est certes érudite et parfois technique, mais elle atteste néanmoins d’un tournant majeur dans la pensée occidentale : une nouvelle approche de la religion et notamment des Écritures, que l’on cherche désormais à comprendre en priorité à travers des méthodes historiques et linguistiques ; une première rencontre à large échelle avec une langue non européenne ; ainsi qu’un vif intérêt pour la religion et la culture juives, qui conduit certains à porter un nouveau regard sur la population juive de leur époque.

Avancement dans l'exposition