Panorama de la presse protestante au XIXe siècle
La presse protestante qui se fait jour au XIXe siècle (un siècle au cours duquel les titres de presse, en général, se sont multipliés) présente différents visages (périodiques, journaux d’information de rayonnement national, bulletins régionaux). S’y ajoutent des informations thématiques liées aux œuvres ou aux associations qui se sont crées à l’époque. Enfin, la littérature « grise » des Correspondances confidentielles entre pasteurs a joué un rôle important pour la conception et le développement de leurs ministères. Cet ensemble est d’une grande richesse.
Une presse et des périodiques protestants de rayonnement national
Pendant la première moitié du XIXe siècle, journaux et revues s’adressent plutôt aux hommes instruits et aux notables. Les publications protestantes n’échappent pas à cette règle. En l’occurrence, il s’agit surtout de revues (annuelles, semestrielles, trimestrielles). Les titres les plus significatifs et les plus durables en ont été :
- Les Archives du Christianisme, fondées en 1818 par le Pasteur Juillerat-Chasseur,
- Les Annales protestantes, fondées en 1819 par le Pasteur Charles Coquerel.
À ces revues parisiennes, s’ajoutent :
- Les mélanges de religion, de morale et de critique sacrée, fondées à Nîmes par le Pasteur Samuel Vincent (1820), revue remplacée en 1834 par Religion et Christianisme, dirigée par le même Samuel Vincent et Le Semeur, fondée en 1839 par Henri Lutteroth,
- Les Christliche Mitteilungen sont fondées à Strasbourg en 1821 par le Pasteur Kraft.
Jusqu’à la Monarchie de Juillet, les articles publiés dans ces revues sont plutôt de tendance revivaliste, mais après 1830, les libéraux prennent une part active dans ce mode de communication et d’information et en diversifient les supports.
D’une part, de nouvelles revues voient le jour :
- Le protestant, fondé par Charles Coquerel en 1831,
- L’Évangéliste, fondé par Ferdinand Fontanès en 1837,
- Le Disciple de Jésus-Christ, fondé par Joseph Martin Paschaud en 1839,
- La Revue de théologie et de philosophie chrétienne, dite Revue de Strasbourg, fondée par Edmond Scherer et Timothée Colani en 1850,
- La Revue chrétienne, fondée par Edmond de Pressensé en 1854,
- La Revue théologique, fondée en 1874 par la Faculté de théologie de Montauban,
- Le Bulletin de la Société d’Histoire du Protestantisme français fondée en 1852.
D’autre part, un intérêt nouveau est apporté aux supports de presse proprement dit, périodiques mensuels ou hebdomadaires, journaux quotidiens, qui font leur place à l’actualité, à son analyse (éditoriaux), ainsi qu’à des informations plus spécifiquement protestantes (comptes rendus de différentes assemblées ecclésiales), y compris des notices nécrologiques. Des titres comme l’Espérance (1838), le Lien (1841) la Voix nouvelle (fondée en 1846 par un pasteur méthodiste, Philippe Boucher), le Signal (fondé en 1879 par le Pasteur Eugène Réveillaud qui est un ancien prêtre converti) reflètent la diversité des intérêts du public protestant français.
Tous ces supports d’information et de réflexion n’ont pas le même succès, mais la dynamique de développement est réelle qui se traduit par des transformations de titres, par des fusions, par un public de lecteurs de plus en plus nombreux.
Une presse religieuse locale active
À partir de la Monarchie de Juillet se développe aussi et à côté des titres à vocation nationale, une presse religieuse locale :
- Le Catholique apostolique et non romain fondé par le Pasteur Cambon en 1839 pour la région du Sud-Ouest,
- Le Réveil, fondé par le Pasteur Macé en 1839 pour la région de Montpellier,
- La Sentinelle fondée par le Pasteur Meynadier à Valence, en 1834,
- L’Observateur évangélique, à Poitiers.
Cette activité spécifique n’a pas toujours survécu aux brimades dont elle fut l’objet pendant la période autoritaire du Second Empire.
Des revues et périodiques liées aux œuvres protestantes
Il faut aussi considérer tous les titres de périodiques liées au développement des œuvres protestantes et créés aux fins d’en faire mieux connaître le propos et les besoins :
- Le Journal des Missions évangéliques, fondé en 1826 sous l’égide de la Maison des Missions évangéliques de Paris, et son complément le Petit Messager des Missions, créé en 1844,
- La Chambre haute, fondée en 1870, à l’initiative de l’Alliance évangélique pour être diffusée dans la région du Gard, complété en 1890 par l’Étendard évangélique, diffusé, lui, dans la région des Charentes,
- L’Ami de la maison qui est, à partir de 1874, l’organe quasi-officiel de la Croix bleue,
- Le Magasin des Écoles du Dimanche (1851), remplacé par le Journal des Écoles du Dimanche en 1888, liés l’un et l’autre à la Société des Écoles du Dimanche.
Des titres d'édification
À cet ensemble s’ajoute des journaux d’édification créés à l’initiative de pasteurs ou de femmes de pasteurs. L’Ami chrétien des familles est le plus célèbre, qui a été fondé en 1858 par des pasteurs luthériens. Madame Sabatier, Madame Decoppet, Madame Puaux auxquelles se sont jointes la femme de l’économiste Jules Siegfied et celle de l’historien Charles Seignobos ont formé le comité de rédaction très actif de La Femme, fondée en 1878.
Le cas des correspondances pastorales confidentielles
Les clivages théologiques entre les pasteurs, qui ont été réels pendant une bonne partie du XIXe siècle et tant qu’il n’était pas possible de réunir un synode national, ont été à l’origine de bulletins de liaison très significatifs et intéressants. On les mentionne généralement sous le titre de « correspondance », car ils étaient le plus souvent autographiés, n’avaient pas de rubriques régulières et se présentaient sous forme de lettres qu’un « correspondant central » réagençait pour leur donner une plus large diffusion. Leur liberté de ton est frappante.
La première « correspondance » en date est la Correspondance Frontin, du nom du pasteur (d’obédience évangélique) qui fut en place à Dijon sous la Monarchie de Juillet. Le Pasteur Benjamin Vaurigaud (de même obédience et qui fut en poste à Nantes de 1861 à 1870) prit lui aussi l’initiative d’une Correspondance évangélique. Mise en suspens par la guerre de 1870, celle-ci fut brièvement reprise par le Pasteur Monbrun en 1877. À ces « correspondances » émanant du Réveil, se sont rapidement ajoutées des « correspondances » plus libérales, telle la Correspondance fraternelle, dite aussi, Correspondance Fontanès, très régulièrement proposée entre 1839 et 1848 et dont le relai a été pris par la Correspondance Cruvellié et la Correspondance Montandon, entre 1852 et 1855. (Hélas, il n’existe plus aucune collection complète de ces trois dernières).
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