La naissance du projet
Le pasteur Freddy Durrleman (1881-1944), fils de négociant, est d’abord évangéliste à la mission Mac All à Paris. Puis, prenant la suite de son ami Élie Gounelle à Roubaix, il se tourne vers le christianisme social et l’aventure des « solidarités », lieux où l’on proclame l’Évangile et on procure une aide concrète. En 1912, à Paris, il devient directeur adjoint de la Société Centrale d’Évangélisation. Au cours de la guerre, d’abord infirmier en hôpital militaire puis à partir de 1915 jusqu’à la fin, il devient aumônier de la Marine sur la flotte de Méditerranée. Au cours de ces années au contact des équipages et des gradés, il prend conscience de la profonde ignorance religieuse de ces hommes. Il rédige et publie Initiation protestante, un ouvrage souvent réédité. C’est alors qu’il décide de fonder une centrale d’Évangélisation par l’édition de livres et de brochures. D’abord appelée Société Pierre Valdo, très vite le nom La Cause s’impose en référence à la manière dont les huguenots désignaient leur « parti » durant les guerres de religion.
En 1920, le pasteur Freddy Durrleman lance une invitation à agir : « Voulez-vous venir le 21 mars, de 2 à 6 heures […] pour étudier, avec quelques amis, un projet d’action missionnaire en France et surtout dans notre vaste région parisienne ? ». Son appel se termine sur ces mots :« La Cause, la seule pour laquelle il vaille la peine de vivre et de mourir. Non pas ma cause, notre cause, ou votre cause, mais La Cause, dans un anonymat superbe, La Cause, qui ne s’appelle pas autrement parce que c’est Sa Cause, celle de Celui à qui, dans un jour comme celui-ci, nous nous sommes donnés… ».
La Cause est officiellement fondée lors de cette réunion organisée en mars 1920 à l’Église luthérienne Saint-Jean à Paris.
Le désir de relancer une foi assoupie et routinière inscrit le projet dans la mouvance des réveils du XIXe siècle. Dès son origine, le mouvement se définit comme un œuvre d’évangélisation et se considère comme missionnaire, religieux, protestant et solidaire
Sa mise en œuvre
À l’origine La Cause est une création commune de la Société Centrale d’Évangélisation et de la Mission populaire ; techniquement, on l’appelle Union pour l’Action missionnaire en France. Elle devient pleinement indépendante en 1926-1927.
C’est d’abord une centrale d’édition publiant les biographies des grandes figures huguenotes, telles que Farel et Coligny, et offrant une structure à une série d’auteurs dont Charles Bost et Charles Dhombre.
Installée à Neuilly-sur-Seine, puis à Carrières-sous-Poissy, La Cause est organisée sur le modèle d’une entreprise commerciale avec divers services. Une dizaine de groupe d’action est définie, chacun a une mission spécifique à accomplir. Ainsi les pionniers Missionnaires, sont les pasteurs mais aussi, rappelant le sacerdoce universel, les prédicateurs laïcs ; les chevaliers servants ont en charge l’organisation matérielle, tandis que les colporteurs de métier ou bénévoles distribuent livres et brochures ; les artistes concoctent des soirées religieuses, les informateurs font des revues de presse tant religieuse qu’athée ; les dépositaires hospitaliers ouvrent leur demeure aux réunions ou aux dépôts de brochures Bibliques, les parrains et marraines visitent les malades et les disséminés, les entraineurs veillent à la formation, les propagandistes s’occupent de communication et les secrétaires veillent sur l’administration.
La Cause tente d’approcher tous le milieux sociaux et professionnels. Les déjeuners mensuels de La Cause réunissent membres et décideurs autour d’un orateur protestant de prestige. Dans le but de former des cadres pour la jeunesse est créée une École de service chrétien offrant des cours par correspondance. Tous les médias sont utilisés : la presse, un mensuel de La Cause, l’audio-visuel avec des plaques pour les lanternes pour illustrer les conférences et surtout la radio avec l’émission « les causeries protestantes » dès 1928 sur Radio Paris, le jeudi à midi.
Face à la complexité politique des années 1930, La Cause se positionne contre le pacifisme, l’objection de conscience et le communisme. En même temps, Freddy Durrleman est l’un des premiers à dénoncer publiquement l’antisémitisme nazi dans une causerie à la radio, le 6 avril 1933, de même que son fils Valdo dans son livre Adolf Hitler, Mein Kampf, pages choisies et classées par Valdo Durrleman (La Cause, 1939). Arrêté le 22 janvier 1941 puis, emprisonné pendant dix-huit mois par la Gestapo pour faits de résistance, Freddy Durrleman meurt le 5 janvier 1944.
De nos jours
Des deux sites du cours Bernard Palissy, fondé en 1942 par France Durrleman (1916-1997), seul le collège Lycée de Boissy-Saint-Léger poursuit l’ambition pédagogique de La Cause ; il est un exemple rare en France d’enseignement privé protestant sous contrat d’association avec l’État.
Les nombreux chantiers lancés dans l’entre-deux guerres par La Cause continuent de se développer. Ils sont maintenant regroupés en quatre grands départements, et leurs diverses actions sont relayées par un service de communication interne et externe qui contribue au rayonnement de La Cause.
–Le département Enfance dans la suite de l’Adoption familiale (1923) comporte un service d’adoption, un service de parrainage et d’aide humanitaire ; ses actions sont dirigées en particulier vers le Togo, Madagascar, Haïti et la France.
– Le département Solos/Duos, conseil conjugal et familial, le réseau Sol Fa Sol (solidarité face à la solitude), est un enrichissement du service Eliezer, service pastoral d’accompagnement de la recherche conjugale, créé en 1930.
– Le département Handicap visuel, extension de l’Amicale protestante des aveugles (1933) propose une bibliothèque adaptée en braille et sonore, des périodiques, et offre des séjours adaptés. Il pratique la collecte de lunettes.
– Le département éditions reste fidèle à sa ligne éditoriale, c’est-à-dire soutenir, éduquer et édifier le public protestant en vue de la diffusion des idées de la Réforme.
Le travail d’évangélisation et de présence au monde lancé par le pasteur Freddy Durrlemn se poursuit et se développe en accord avec son temps. La Cause est devenue par décret du 21 octobre 2008 une fondation d’utilité publique.