Jacques Seydoux (1870-1929)

À la fois diplomate, expert, chroniqueur, Jacques Seydoux est un conseiller écouté dans le monde entier ; sans doute le premier à comprendre, en France, l’importance des facteurs économiques et financiers dans le contexte des relations internationales, il joue durant toute sa carrière un rôle essentiel dans l’élaboration de la politique étrangère et commerciale de la France.

Formation

  • Portrait de Jacques Seydoux
    Portrait de Jacques Seydoux, années 1920 © Collection particulière
  • Jacques Seydoux
    Jacques Seydoux © Collection particulière/Hubert Coste

Jacques Seydoux est le petit fils de Charles Seydoux (1796-1875), tête de la branche aînée de la famille Seydoux. Il naît à Pau dans une famille protestante d’origine suisse ; son père, Auguste, diplomate, se retire prématurément. Il fait ses études à la faculté de Droit et à l’École Libre des Sciences Politiques puis est reçu premier au concours de la «Carrière» ; il entre au Quai d’Orsay (ministère des Affaires étrangères) à 23 ans, en 1893.

De 1893 à 1898 il est attaché d’ambassade à Londres, dans une période d’extrême tension avec la France, celle précédant la crise de Fachoda, où les Anglais contraignent la France à se retirer ; il en revient fasciné par la culture et le mode de vie britannique.

 

Après deux courts séjours à Athènes et La Haye, il est nommé secrétaire d’ambassade à Berlin où il reste de 1901 à 1905 ; il y mesure l’influence de la banque et de l’industrie dans la définition de la politique allemande.

Il épouse en septembre 1902 Mathilde Fornier de Clausonne, seule héritière d’une famille de négociants protestants de Nîmes, anoblie en 1776.  C’est à Berlin que naît leur fils François, qui sera pendant dix ans ambassadeur dans ce poste. Ses enfants relèvent en 1923 le nom de leur mère, pour s’appeler désormais Seydoux Fornier de Clausonne.

Rentré en France, Jacques Seydoux se voit confier les affaires délicates du Maroc, après le Coup d’Agadir (provoqué par l’envoi d’une corvette allemande en 1911 en face d’Agadir).

C’est en 1907, à 37 ans, qu’il est atteint d’un rhumatisme déformant qui le fait cruellement souffrir jusqu’à sa mort prématurée en 1929.

Sa vocation économique

  • Conférence de Gênes, Jacques Seydoux (avec une canne)
    Conférence de Gênes (1922) Jacques Seydoux (avec une canne) © Wikimedia Commons (domaine public)
  • M. Seydoux, Directeur politique adjoint au Quai d'Orsay à son bureau
    M. Seydoux, Directeur politique adjoint au Quai d'Orsay à son bureau (1924) © Wikimedia Commons (domaine public)

La guerre donne à sa vie professionnelle une orientation nouvelle : à partir de mars 1915, il est le correspondant du Quai d’Orsay au Comité de Restriction du Commerce avec l’Ennemi ; puis il devient chef de service à la Direction du blocus, sous-directeur au ministère du blocus et des régions libérées, puis représentant de la France au comité du blocus, lors de la conférence de la Paix. Il s’impose à ces différents postes comme un expert indispensable à la compréhension des mécanismes économiques et financiers : ses avis de haut fonctionnaire sont sollicités par tous les responsables politiques de l’époque.

En mai 1919, le Secrétaire Général du ministère, Philippe Berthelot, crée pour lui la sous-direction des relations commerciales, première prise en compte des affaires économiques dans les compétences du Quai d’Orsay ; la tâche qui lui est confiée est considérable : liquidation du Blocus, échanges commerciaux, réparations et dettes interalliées ; il est un des rares responsables français à accorder attention aux pays d’Europe Centrale et à la redoutable question des réparations autrichiennes et hongroises.

Il représente la France aux conférences interalliées de Spa (juillet 1920), Bruxelles (décembre 1920), Londres (mars et mai 1921), Cannes (janvier 1922), Gênes (avril-mai 1922), Londres (juillet-août 1924) où l’accompagne son fils François.

Pour résoudre le problème des réparations dues par l’Allemagne avec équité et bon sens et dans des conditions qui ne soient pas écrasantes pour l’économie allemande, il fait preuve de modération et d’imagination ; mais il lui faut attendre 1924 pour être entendu.

Jacques Seydoux coordonne depuis Paris toute l’occupation française de la Ruhr, étant dans cette affaire le principal collaborateur du président de la République Raymond Poincaré, puis du ministre des travaux publics, des transports et du ravitaillement, Edouard Herriot. Mais de plus en plus miné par la maladie et en désaccord croissant avec la politique d’Aristide Briand, président du Conseil et ministre des affaires étrangères, il met fin en décembre 1926 à sa carrière de diplomate.

 

L’influenceur

Sa nouvelle vie dans son appartement du boulevard de Courcelles est incroyablement active : il entre au conseil d’administration de la Banque de Paris et des Pays-Bas ; en février 1927 il est élu membre du Comité franco-allemand d’information et de documentation ; il est aussi délégué général du Comité d’action pour la Société des Nations.

Il devient également journaliste et publie dans de nombreuses revues françaises, anglaises et allemandes ; il donne au Petit Parisien, un des grands journaux de l’époque, une chronique hebdomadaire très suivie intitulée Notre politique extérieure. Il fonde en outre, fin 1926, un hebdomadaire indépendant de politique et d’économie internationale, Pax, édité à Paris et à Genève.

Bien des traits de sa pensée paraissent aujourd’hui prophétiques : l’importance de la relation franco-allemande, la primauté de l’économique sur le politique, la mise en place progressive d’une union douanière européenne. Après des années de souffrance, il subit fin 1928 une grave opération qui le condamne définitivement au lit, où il meurt le 26 mai1929, âgé de 58 ans.

Bibliographie

  • Livres
    • JEANNESSON Stanislas, Jacques Seydoux diplomate, PUPS, 2012
    • SEYDOUX Jacques, De Versailles au plan Young, Plon, 1932
  • Articles
    • SEYDOUX François, « Jacques Seydoux, mon père », Revue des Deux Mondes, janvier 1964 | Lien

Notices associées

  • Les Seydoux

     La famille française des Seydoux, implantée en France au XVIIIe siècle, est d’origine suisse. Ses membres s’illustrent dans l’industrie, textile et cinéma, et dans la diplomatie.