La faculté de théologie protestante de Strasbourg
La faculté de théologie protestante de Strasbourg, héritière de l’École fondée en 1538, est l’un des plus anciens lieux de formation aux divers ministères des Églises.
Au sein de l’Université de Strasbourg, elle propose aujourd’hui, outre ses cursus théologiques conclus par des diplômes d’État, des activités de formation continue et elle développe une importante activité de recherche scientifique.
Les origines
Les idées de la Réforme se répandent dès le début du XVIe siècle à Strasbourg : elles contribuent à fonder les structures d’un enseignement théologique et humaniste renouvelé. Martin Bucer, un dominicain défroqué et marié, ouvre en 1523 un cours d’exégèse des livres bibliques, en allemand puis en latin. Avec l’appui d’autres adeptes des nouvelles idées de la Réforme, comme Capiton, le cours d’exégèse est complété par l’enseignement des langues anciennes (latin, grec, hébreu), de l’art poétique, de la rhétorique, des mathématiques et du droit. Un internat est créé en 1534.
Le succès de cette préparation de type universitaire des futurs pasteurs amène à l’institutionnalisation de l’établissement. En 1538 est créée la « Haute École », où enseigne Jean Calvin de 1538 à 1541. En 1566, cette dernière est élevée au rang d’Académie, puis d’Université en 1621.
Pendant 40 ans, Jean Sturm est le recteur et l’âme de l’établissement, dont le programme vise à promouvoir « la piété, le savoir et l’éloquence ». La théologie, sans être la seule discipline enseignée, y occupe une place privilégiée.
De la Révolution à la Première Guerre mondiale
A la Révolution française, en 1793, l’Université est supprimée. Professeurs et étudiants tentent tant bien que mal de poursuivre les enseignements, jusqu’à la mise en place d’une nouvelle structure par Bonaparte : la faculté de Strasbourg, établie par décret consulaire du 30 floréal an XI (20 mai 1803) pour assurer la formation des pasteurs luthériens, est ouverte sous le nom « d’Académie des protestants de la Confession d’Augsbourg ».
Ses professeurs sont nommés par le Directoire luthérien sur proposition des professeurs en exercice. Elle prend en 1808 le nom de « Séminaire protestant ».
En 1819 est instituée une faculté de théologie relevant de l’Université d’État : deux organes d’enseignement théologique coexistent donc désormais, l’un relevant de l’Église luthérienne, l’autre de l’État, mais travaillent de concert puisque les professeurs sont les mêmes et que les programmes sont coordonnés.
Les études s’organisent en deux sections, comme à la faculté de théologie réformée de Montauban : deux années préparatoires, puis trois années de théologie.
La faculté abrite six chaires : cinq sont luthériennes, et la sixième est réservée à un professeur de dogmatique réformée, les réformés d’Alsace, dont le nombre n’est pas négligeable, ayant demandé à occuper leur place tant au niveau des professeurs que des étudiants. C’est Mathias Richard, de Mulhouse, qui occupe cette chaire jusqu’en 1868, puis Auguste Sabatier de 1868 à 1871.
La faculté de théologie de Strasbourg, dont les cours sont donnés en allemand ou en français selon les professeurs, voit se succéder des enseignants de grande renommée : Jean-Frédéric Bruch (1792-1874), Édouard Reuss (1804-1891), Guillaume Schmidt (1812-1895), Timothée Colani (1824-1888), Édouard Cunitz (1812-1886), Frédéric Lichtenberger (1832-1899)… La revue fondée en 1850, Revue de théologie et de philosophie chrétienne, appelée plus couramment Revue de Strasbourg, contribue également au rayonnement de la faculté aussi bien vers l’Allemagne qu’en France.
Entre 1872 et 1918, elle devient l’evangelisch-theologiche Fakultät de la Kaiser-Wilhelms-Universität ; elle s’installe dans des locaux plus spacieux, l’actuel Palais universitaire.
Certains des enseignants, refusant d’enseigner sous la tutelle allemande, fondent en 1877 la faculté de théologie protestante de Paris.
Une continuité avec la période antérieure est cependant assurée par les enseignants alsaciens restés en place ; et les professeurs allemands nouvellement nommés s’efforcent de tenir compte de la mentalité et du particularisme alsaciens. Le Badois Heinrich Julius Holtzmann (1832-1910) est l’un des exégètes les plus connus de sa génération ; Albert Schweitzer (1875-1965) y assure les cours de Nouveau Testament jusqu’en 1912.
Au XXe siècle
Le retour de l’Alsace à la France marque un nouveau départ : la faculté de théologie est reconstituée au sein de l’Université de Strasbourg en 1919 ; son caractère public est reconnu officiellement par un décret de 1924.
Une nouvelle génération d’enseignants arrive : Fernand Ménégoz, Guillaume Baldensperger, Paul Sabatier, Antonin Causse, Henri Strohl, Oscar Cullmann, William Seston, Jean Daniel Benoît… La première inscription d’une jeune fille en première année a lieu en 1922. Les étudiants étrangers forment environ un tiers des effectifs.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, la faculté se replie à Clermont-Ferrand, comme l’ensemble de l’Université de Strasbourg, et poursuit ses activités dans des conditions difficiles (arrestation et déportation de trois de ses enseignants), avant de rouvrir dans la capitale alsacienne en 1945. S’y illustrent notamment les professeurs Pierre Burgelin, André Caquot, Roger Mehl, Rodolphe Peter, Charles Hauter, Marc Honegger pour la musicologie…
Avec la loi de 1984 sur l’enseignement supérieur, la faculté de théologie devient un institut au sein de l’Université des Sciences humaines (Université Marc-Bloch Strasbourg III). En 2009, avec l’unification des trois universités, la faculté devient un institut de l’Université de Strasbourg. Elle est le seul établissement de théologie protestante à délivrer des diplômes nationaux.
Un établissement d’excellence
Son réseau relationnel actuel est large (notamment en Allemagne avec les universités de Marburg, Tübingen, Heidelberg, et en Suisse, avec celles de Lausanne, Genève et Neuchâtel).
La faculté compte quelque 200 étudiants réguliers français et étrangers répartis dans les trois cursus (licence/master/doctorat). Sa bibliothèque, créée en 1919, est jumelée depuis 1971 avec celle de théologie catholique.
Les enseignements proposés sont répartis entre disciplines bibliques (Ancien Testament, Nouveau Testament, hébreu et grec anciens), disciplines historiques (histoire du christianisme ancien, médiéval, moderne et contemporain, histoire des religions), disciplines systématiques (théologie systématique, dogmatique, éthique, philosophie) et disciplines pratiques (musicologie, sociologie des religions, théologie pratique, homilétique).
Outre la préparation aux ministères pastoraux, elle assure la formation des professeurs qui enseignent la religion dans les lycées et collèges (les établissements scolaires étant eux aussi placés sous régime concordataire en Alsace-Moselle).
Par ailleurs, la faculté propose de nombreux cours de formation continue pour les pasteurs et les laïcs engagés, formant aux divers services de la diaconie et contribuant à la formation des prédicateurs laïcs, à celle des catéchètes et des chefs de chœur.
Enfin la faculté de théologie regroupe d’importants centres de recherche autour de quatre axes exprimant la variété du champ disciplinaire :
- « Les textes de référence et leur réception »,
- « Histoire du christianisme »,
- « Dogmatique, œcuménisme et théologie pratique »,
- « Sociologie des religions et éthique sociale ».
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Bibliographie
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